Chroniques

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...Et j'ai couché dans mon char

Louis Potvin
Le 26 septembre 2023 — Modifié à 09 h 13 min le 26 septembre 2023
Par Louis Potvin - Rédacteur en chef

Jasette de la gazette

Des étudiants de l’UQAC sont obligés de le faire pendant quelques jours, le temps de trouver un logement. Coucher dans leur char. À Roberval, ce sont des personnes en situation d’itinérance qui dorment dans des tentes à la Pointe Scott. Personne, il y a dix ans, n’aurait pu prédire qu’il y aurait de l’itinérance à Roberval, à Alma et à Dolbeau-Mistassini. Personne ne pensait que le nombre d’itinérants au centre-ville de Chicoutimi grimperait aussi vite.

Ce qu’on croyait être un «problème» montréalais touche désormais notre région. L’itinérance nous rattrape, et vite à part de ça. Selon les chiffres de la Santé publique, 231 personnes en 2022 étaient en situation d’itinérance. Il s’agit d’une augmentation de 26% par rapport à 2018.

Signe que la situation est grave, l’hiver dernier Roberval et Alma ont mis à la disposition des personnes des roulottes pour qu’elles puissent avoir un toit pour ne pas dormir dehors à moins 30 degrés en février.

La situation est rendue tellement préoccupante qu’un sommet a eu lieu la semaine dernière à Québec pour en discuter et tenter de trouver des solutions.

Mais comme pour toute problématique complexe, la solution n’est pas évidente à trouver. Et si on avait mis le doigt sur le bobo, l’itinérance serait réglée depuis longtemps...

Or c’est le contraire, le phénomène a empiré partout au Canada. Le nombre d’itinérants a doublé au Québec.

On pointe du doigt le manque de logement. Est-ce la seule raison qui explique que ces êtres humains se retrouvent à la rue à dormir dehors ou dans un refuge? Bien sûr que non.

Précarité financière, santé mentale, alcoolisme, toxicomanie, les raisons peuvent être nombreuses et multifactorielles. D’où l’importance de mettre en place une approche ciblée et adaptée pour leur venir en aide.

Manque de logements

Mais revenons sur le manque de logements, surtout abordables et adaptés aux gens.

Selon une étude de la SCHL, en 2022 une personne sur l’aide sociale recevait 725$ par mois et le prix moyen d’un loyer une chambre à Montréal était de plus de 900 $. Comment se loger dans les circonstances à part avoir accès à un HLM? La région n’échappe pas à cette hausse du prix des logements.

Il n’est pas normal qu’un jeune couple ait de la difficulté à se trouver un loyer à Roberval. Et la situation est pareille à Alma ou Saguenay.

Et je ne vous parle même pas de la discrimination que peuvent subir les autochtones ou les étudiants étrangers parce que leur nom de famille est Awashish ou qu’ils ont un accent ivoirien.

On manque d’appartements pour loger les étudiants étrangers. On n’a pas assez de logements adéquats pour les nouvelles familles qui veulent s’installer dans la région. Notre développement stagne par ce manque de vision.

Et les prix demandés pour un logement même en région frisent l’indécence. Comment arriver quand une personne seule avec des enfants gagne 500$ par semaine et doit payer 750 $ pour son appart?

Cohabitation

Mais au-delà de trouver un toit aux itinérants, il faut composer avec cette nouvelle réalité.

C’est certain que ça dérange de se faire demander de l’argent à la porte du Maxi de Roberval ou au cœur de la Racine. Le senti- ment d’insécurité est augmenté pour une bonne partie de la population et c’est normal. C’est moins tentant de marcher en soirée sur le boulevard Saint-Joseph à Roberval ou en plein cœur de Chicoutimi.

Nous faisons face à une crise sociale et toute la communauté doit s’impliquer pour soutenir ces gens. Il faut démontrer une ouverture d’esprit et surtout ne pas les stigmatiser.

Déjà que le fossé entre les riches et les pauvres semble désormais se creuser davantage.

Il faut éviter que d’autres se retrouvent dans cette situation. Et se retrouver à coucher dans leur char...

« Le jour s’est levé sur Rouyn

Avec des gros rayons d’or

J’ai jasé avec mon instinct

Et j’ai couché dans mon char»

Richard Desjardins

 

Chaque semaine, un membre de l’équipe de Trium Médias prend parole sur un sujet de son choix, c’est La Jasette de la gazette.

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